Dès le début de mon mandat, j'ai un gros dossier sur le bureau : celui des antennes de téléphonie mobile. C'est un sujet que je connais depuis longtemps. Je sais quels sont les enjeux économiques, et je sais aussi que le principe de précaution doit s'appliquer aux ondes électromagnétiques. J'ai rencontré des gens inquiets, et d'autres qui sont malades à cause de ces ondes. Je sais aussi le lobbying intense qui peut s'exercer dans ce domaine.
En accord avec Pierre Cohen, je pose un moratoire sur l'installation de toute nouvelle antenne, et je commence un travail de rapprochement des Associations (Antennes 31, Robin des toits...) et des opérateurs (SFR, Bouygues, etc.), ainsi que des riverains inquiets mobilisés. Mon idée est de rédiger en commun une Charte de bonne conduite, qui garantisse aux Toulousains une information totale et limpide et des niveaux électromagnétiques maîtrisés, et aux opérateurs un fonctionnement convenable des réseaux. Cela prend du temps, mais il y a de la bonne volonté de part et d'autre.
Nous nous mettons d'accord sur un maximum de 0,6 volts/mètre, sur l'obligation d'une information et d'une concertation avec les riverains lors de l'installation d'une nouvelle antenne, et sur l'interdiction de toute nouvelle installation dans les endroits où il y a déjà un champ important.
C'est alors que Pierre Cohen me demande de reporter des réunions. Puis il veut reprendre lui-même la négociation. Il nous fait perdre du temps… Puis il charge Daniel Borderie, un de ses conseillers (PS bien sûr), de diriger les discussions, et s'arrange pour que je puisse de moins en moins m'en occuper. Et peu à peu les opérateurs se désengagent et annoncent qu'ils ne signeront pas la Charte que j'élaborais avec eux...
Je résiste comme je peux : À défaut de Charte, j'obtiens la création d'une Commission de Concertation, mais avec des objectifs moins ambitieux : On passe à environ 1 volt/mètre, toutefois il reste l'obligation d'information et de concertation. Je finis par me dire que c'est toujours ça de pris.
Par la suite, cette Commission se met à dériver aussi : je constate que les comptes-rendus ne reflètent pas exactement les propos qui y sont tenus. Je vois que les Services techniques, qui doivent être au service des élus, délivrent sans mon accord des autorisations pour de nouvelles antennes. J'alerte Pierre Cohen, qui, le plus souvent, fait le sourd. Daniel Borderie (je rappelle qu'il n'est pas élu et ne représente pas les citoyens) ne répond pas aux mails que j'envoie pour signaler les anomalies et les inquiétudes des habitants. Je suis sans pouvoir ! La démocratie, qui donne le pouvoir aux élus, est bafouée.
Je bataille pour sauver ce qui peut l'être, difficilement. Je reste loyale avec Pierre Cohen et la Majorité, parce que j'ai aussi d'autres dossiers importants (cantines scolaires, Légumerie, Régie agricole …) que je ne veux pas abandonner. C'est pour le moins désolant.
Or, le pire n'est pas encore arrivé : on annonce la 4G. Je crains une explosion des champs électromagnétiques. Je réussis à faire admettre à Pierre Cohen qu'il ne faut pas autoriser la 4G tant qu'on n'aura pas la garantie que les champs resteront dans les limites fixées par la Commission (« environ » 1 volt/m). Arrive la réunion où on doit exiger cette garantie : Il y a là Pierre Cohen, les opérateurs, les représentants des Associations de défense des habitants et moi-même. Au moment de discuter la 4G, le représentant d'une des Associations présentes déclare qu'il n'y a pas besoin de garantie, qu'on n'a qu'à l'installer et faire les contrôles après. Les autres représentants d'association ne disent rien.
Je ne comprends plus : Pourquoi sont-ils là ? Qu'est-ce qui les a retournés comme ça ?
Évidemment, Pierre Cohen et tous les autres embrayent au quart de tour, et la décision est prise sans discussion : on fait la 4G tout de suite. Pour les précautions, on verra plus tard...
Je ne sais plus quoi dire, ni quoi faire : Si les associations de défense des habitants elles-mêmes se débinent, si les services techniques ne veulent travailler que dans l'intérêt des industriels, comme le Maire, alors je ne vois pas comment je peux agir, malgré ma conviction que la santé publique est en cause.
Cependant je peux témoigner, comme aujourd'hui. Pour que chacun vote en sachant qui fait quoi, y compris dans les Associations. Les élus ont beaucoup de pouvoir, et le Maire reste le chef absolu. Si j'avais été Maire, nous aurions désormais une charte, et des niveaux de champ électromagnétique bien contrôlés. Ce n'est pas le cas, par choix du Maire Pierre Cohen, contre mon avis !
Heureusement, le 23 mars 2014 nous pouvons encore voter...